Une conservatrice durant le montage d'une exposition.

Une conservatrice durant le montage de l'exposition Copyright humain. Photo : Amélie Breton, Perspective.

Un visiteur qui entre dans un musée et voit un magnifique objet placé bien sagement dans une vitrine ne se doute pas du chemin parcouru pour arriver à sa contemplation. Le conservateur joue un rôle important dans le parcours des objets. Dans un musée traditionnel, ce professionnel a généralement une formation spécialisée en histoire de l’art et s’occupe d’un secteur de collection. Au Musée de la civilisation, l’équipe de conservateurs vient de différents horizons : histoire, archéologie, bio-écologie, ethnologie, anthropologie et histoire de l’art. En effet, l’approche thématique au Musée de la civilisation a engendré une nouvelle génération de conservateurs qui a dû rapidement se transformer en généralistes capables de s’adapter selon des projets d’exposition quelques fois éloignés de leur champ d’expertise.

Le conservateur d’exposition doit travailler étroitement avec toute une équipe afin de sélectionner les pièces qui traduiront le mieux le scénario de l’exposition. Rapidement, le conservateur doit « tout » savoir sur ces pièces dont il deviendra le gardien. La connaissance ne se limite pas à leur documentation, il faudra aussi connaître les normes de présentation et de conservation, planifier les transports, gérer des listes détaillées, discuter du support d’objet, rédiger les vignettes et faire les constats d’état à l’arrivée comme au départ des pièces.

Conservateur lors du montage de l'exposition Le Temps des Québécois. Photo : Idra Labrie, Perspective.

Un conservateur vérifie la mise en caisse d'artefacts. Photo : Idra Labrie, Perspective.

Étant donné la variété des thèmes des expositions, en plus de la présentation des objets de notre collection, nous devons emprunter beaucoup de pièces à l’étranger. Annuellement, nous recevons en moyenne 800 objets en provenance de nombreux pays. Il arrive fréquemment que des convoyeurs étrangers accompagnent les objets prêtés. Ils assistent alors au montage en salle. Imaginez un peu le défi de conduire chaque objet dans sa vitrine avec le support fabriqué sur mesure, les conditions de conservation adéquates, le système de sécurité nécessaire, le bon éclairage et, tout cela dans le but d’offrir aux visiteurs l’objet sous son meilleur jour. Les techniciens en muséologie demeurent des alliés importants dans notre travail. La présentation des pièces joue un rôle essentiel dans cette approche. Nous avons le souci de renouveler notre pratique et de chercher à offrir des nouvelles perspectives de lecture d’exposition.

Vérification de l'éclairage. Photo : Amélie Breton, Perspective.

Vérification de l'éclairage. Photo : Amélie Breton, Perspective.

En tant que conservateur d’exposition, il arrive que nous ayons à nous déplacer à l’extérieur du pays que ce soit pour faire un aller-retour d’une journée pour aller porter un objet précieux à son prêteur ou encore participer pour une durée parfois longue à la sélection des artefacts pour une exposition. Pour chacune de ces missions, les gens de notre entourage ont toujours eu la même réflexion : chanceuse! Oui, c’est vrai qu’il est très stimulant de se rendre travailler dans un autre pays, rencontrer de nouveaux collègues et côtoyer d’autres cultures. À chaque fois, notre passion pour ce travail de conservateur se renforce : traverser la Place Rouge chaque matin pour superviser l’emballage des objets; rouler en pleine nuit dans le désert syrien pour aller replacer sur leurs socles des sculptures millénaires; faire le constat de la momie qui fut présentée dans l’exposition Tintin, déambuler dans les immenses salles d’exposition des musées du Vatican en admirant l’objet sacré qui sera dans une vitrine de notre institution dans quelques mois; oui c’est excitant.

Installation d'artefacts en vitrine. Photo : Amélie Breton, Perspective.

Installation d'artefacts en vitrine. Photo : Amélie Breton, Perspective.

L’autre facette de la profession de conservateur d’exposition se déroule dans l’ombre à refaire la liste d’objets pour la centième fois parce que la sélection change constamment; après un voyage de 32 heures, commencer à faire des constats d’état dans une autre langue; essuyer un refus de prêt à la dernière minute et devoir trouver une autre pièce en quelques heures ; constater lors de l’installation dans la vitrine que les dimensions reçues n’étaient pas les bonnes; isoler en catastrophe des objets parce que des insectes ont décidé de voyager dans la même caisse; avoir le cœur qui débat parce la sculpture que l’on installe est très fragile et qu’il faut la manipuler aussi délicatement qu’un grand blessé; voilà les défis quotidiens du conservateur d’exposition. Le conservateur se promène en zone de lumière et d’ombre.

Le profil des professionnels au Musée de la civilisation a des contours indéfinis mais les mêmes qualités de base sont requises : polyvalence, ouverture, minutie, rigueur et surtout passion, car les défis se révèlent souvent être des escalades du mont Everest!

Katherine Tremblay
Conservatrice