Photo : Gracieuseté de Moche Safdie

Curieuse de connaître la vision qu’avait Moshe Safdie (Habitat 67) lorsqu’il a conçu les toits du Musée il y a 25 ans, je lui ai posé quelques questions auxquelles il s’est empressé de répondre. De quoi nourrir mes réflexions quant à ce magnifique espace public et alimenter mon processus de création de Géométrie des espaces présenté sur les toits cet automne. Voici donc ses réponses !

Lorsque vous avez conçu les toits et les terrasses du Musée ;

Avez-vous eu des contraintes particulières à considérer ?

Durant le concours d’architecture, il nous était mentionné que chaque côté de la rue (Dalhousie) serait éventuellement développé pour le Musée. J’ai donc élaboré un concept architectural avec un raccordement souterrain entre le bâtiment principal (l’actuel Musée) et une autre section donnant accès au fleuve. Ainsi, les escaliers partaient du fleuve et continuaient de monter jusqu’aux toits du bâtiment.

Quelles étaient vos sources d’inspiration ?

Lorsque j’étudiais l’histoire du site, j’ai trouvé une illustration d’un marché de Québec situé sur le même emplacement et qui avait des escaliers pour accéder au fleuve.

Le marché Finlay et ses quais (Finlay Market and wharves), Engraving, J. Filmer, 1870-1874, Archives de la Ville de Québec; collection de documents iconographiques de la Ville de Québec; excerpted from Picturesque America, negative N009873-1 (*)

 

Quelles étaient vos réflexions quant à l’espace à créer ?

L’idée de donner au Musée cette même particularité me sembla une belle manière de célébrer les racines de l’histoire de Québec avec le fleuve et ses explorateurs. Après tout, ce sont les cours d’eau et leur raccordement au fleuve qui devinrent les chemins de la découverte.

Le thème de la montée (sur les édifices) est récurrent dans mon travail. Je pense être inspiré par les pyramides de différentes traditions, particulièrement celles des Mayas et des Aztèques du Mexique où les rituels culturels impliquent l’ascension du bâtiment jusqu’au sommet. Dans le cas du Musée de la civilisation, l’idée était de créer un parc sur les toits qui soit accessible par des escaliers des deux côtés du bâtiment (rue Saint-Pierre et rue Dalhousie). Une fois au sommet, un peu comme en Haute Ville, il devenait possible d’avoir une vue sur le port. Ainsi, le bâtiment lui-même devenait un microcosme en soi, offrant la ville d’un côté et le port de l’autre.

Aviez-vous une vision précise de leur fonction ?

Le concept était de permettre au gens de passer d’un côté à l’autre par l’ascension des toits. De plus, avec ses deux entrées, l’une côté fleuve et l’autre côté ville, cela permettait au gens de traverser le Musée par l’intérieur. Quant aux toits en eux-mêmes, ils étaient vus comme un espace paysagé riche en végétation. À l’ouverture du Musée, un concept initial avec des arbres et des arbustes avait été développé. Concept qui a évolué de façon ambitieuse avec le temps et ce fut un plaisir pour moi d’en suivre la progression. J’espère que cela va continuer.

 

Et si nous nous permettions de rêver, les toits et leurs terrasses pourraient…

… Être sous le thème du Jardin du Paradis. L’aménagement paysagé viserait à recréer la mémoire du Jardin d’Eden originel. Je pense qu’il s’agissait d’un endroit chaleureux et confortable. Ce serait parfait pour la programmation estivale. Il faudrait penser à une autre métaphore pour l’hiver.

 

Je dois avouer que lors de la lecture initiale des réponses de Moshe Safdie à mes questions envoyées par courriel, j’étais étonnée par son accessibilité et son empressement. Aujourd’hui, après les avoir traduites et partagées sur le blogue, je saisis mieux en quoi elles ont donné de la profondeur à mes réflexions et nourri mon processus de création. Cette idée que les toits d’un édifice soient un lieu de passage entre la ville et le fleuve entre en cohésion avec Géométrie des espaces où l’architecture de ce qui est construit devient la métaphore d’une architecture intérieure dont la construction s’effectue justement grâce à tous ces passages que nous traversons dans la vie entre deux états.

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À venir…

Comment faire dialoguer Géométrie des espaces avec la mission du Musée ?

 

 (*) l’image du marché Finlay est tirée de l’exposition virtuelle Place Royale, d’aujourd’hui à hier